dimanche, août 30, 2009

Vélo crucifiant

Par Jacques Rancourt




L’air pur du cycliste amateur que je suis
Les cheveux au vent et l’admiration constante
Les routes tortueuses et les sentiers rupestres
Quelle source de plaisir pour le bipède que je suis

Très souvent mes yeux innocents croisent
De nombreuses croix semées sur les bords
De ces routes de ma jadis catholique région
Je sursaute chaque fois à cette étrange évocation

Qui sont ces étonnants bipèdes qui se rassasient
D’une telle morbidité ainsi exposée dans toute son horreur
Quelle exploitation fatale du chagrin et de la tristesse
Quelle est cette religion qui expose ainsi un homme nu
Cloué à une croix devant laquelle on pleure et on frémit
Cette source de larmes intarissable depuis des siècles

Je reprends ma route en vélo et mes neurones s’étonnent
Le fils de ce prétendu Dieu se laisser ainsi crucifier bêtement
Ce prétendu faiseur de miracles impuissant dans sa puissance
Le bon peuple avait besoin de ce sang pour s’agenouiller

L’homme rationnel refuse d’avaler de douloureux fiel
Son esprit critique et scientifique se rie de ce montage
Il préfère dévaler les pentes et admirer les ruisseaux
Entendre chanter les oiseaux et contempler les étoiles
Il préfère maintenant détourner son regard de cette croix
Et regarder la chèvre de l’autre côté du chemin brouter


2 commentaires:

Richard a dit...

Ton poème fait un clin d'oeil aux Croix de chemin, pourquoi sont-elles là?

Les Français débarquant au Canada au XVIIe siècle transportèrent ici la coutume de planter la croix en signe d'appartenance religieuse. La croix, accompagnant l'occupation progressive du sol par nos ancêtres, se retrouvera disséminée le long du Saint-Laurent et progressivement dans tout le territoire du Québec.

La croix de chemin est un lieu de prière. Si l'Église est éloignée, elle la remplacera un peu, rassemblant autour d'elle les habitants du rang pour les prières publiques.

QUATRE MODÈLES DE CROIX ....

LA CROIX SIMPLE se contente d'un poteau et d'une traverse. On l'enjolive parfois à l'axe des deux poutres.

La CROIX AUX INSTRUMENTS DE LA PASSION honore par de multiples ornements le souvenir de la Passion du Christ, en particulier le coq, le cœur, la lance et le bâton à éponge.

Le CALVAIRE quant à lui représente le Christ en croix, entouré parfois d'autres personnages comme la Vierge Marie et saint Jean debout près du Crucifié.

Enfin, d'autres CROIX OUVRAGÉES présentent une ornementation géométrique ou fIeuronnée. Un indice pour en reconnaître plusieurs: elles sont souvent en fer forgé.

DEUX EXEMPLES CÉLÈBRES
L'exemple laissé par les fondateurs n'aura donc pas été oublié. Qui ne connaît en effet la CROIX DE GASPÉ (1534), croix de fondation que Jacques Cartier planta au nom du roi de France? Une croix de Laval évoque son souvenir. La CROIX DU MONT ROYAL rappelle celle que Maisonneuve transporta lui-même sur la montagne en 1643. Il s'agissait d'une croix votive puisque, plantant une première croix devant les eaux qui allaient inonder le fort, Maisonneuve fit publiquement le vœu d'en ériger une sur le mont si la ville naissante était sauvée. La faveur accordée, le fondateur de Montréal accomplit sa promesse.

« Extraits du dépliant sur les calvaires et croix de chemin de Laval réalisé par Benoît et Irène Caron de la Société d'histoire et de généalogie de l'Île Jésus dans le cadre d'une entente entre Ville de Laval et le ministère de la Culture et des Communications du Québec. Décembre 1999. »

Enfin ton poème m'a permis une recherche pour les situer dans l'histoire du patrimoine religieux au Québec.

Merci

Jacques Rancourt a dit...

Richard,
Excellente analyse sociologique, culturelle et historique.
Tu ne fais que relater, mais tu ne contestes en rien le pourquoi fondamental de ce symbole religieux.

Par exemple, il faut avoir beaucoup de toupet pour Jacques Cartier de décider que ces terres appartiennent désormais au Roi de France faisant fi de ces milliers de premiers habitants qui y vivent depuis des siècles. Cette déclaration de Jacques Cartier est une officialisation d'un vol de terres. C'est pourquoi aujourd'hui encore on demande une réparation historique.
Quand à ce Dieu cloué sur une croix, cela mériterait un tout autre débat.
Évidemment l'endoctrinement a été si total que cela exige un miracle pour remettre en question ce qui fut inséminé dans la tête du bon peuple.