samedi, mai 05, 2007

La chimèrocanthrope

Par Jacques Rancourt
La série Ocanthrope
Mes autres poèmes

La chimèrocanthrope

Elle a l’imagination fertile
Elle ne contrôle pas la folle du logis
Elle vous amène au bord de la folie
Elle vit toujours au bord d’un précipice

Elle s’imagine les pires accidents
Elle s’imagine les pires maladies
Elle s’imagine les pires machinations
Elle s’imagine les pires catastrophes

Elle voit l’avion tomber du ciel
Elle voit le navire couler à pic
Elle voit l’auto frapper un bloc de béton
Elle voit le vélo tomber d’un pont

Elle croit son mari à l’agonie
Elle croit son fils atteint de la tuberculose
Elle croit sa mère cancéreuse
Elle croit son chat plein de puces

STOP STOP STOP

N’entrez pas dans son jeu
Ne dites surtout rien
Ne brisez pas son monde intérieur
Ses chimères la font vivre

Elle est la fille difforme d'Échidna et de Typhon

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Le monde chimérique! Quel monde déconcertant!
C'est notre ami Jean-Jacques Rousseau qui déclare dans ses "Rêveries du promeneur solitaire" :
"Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d'être habité"
Mais ce monde chimérique peut transformer ta vie en un véritable enfer, comme ton poème le souligne.
Mais pour moi, c'est plutôt les 12 sonnets composés par Gérard de Nerval, intitulés "Les Chimères", petit recueil de poèmes que l'on retrouve à la fin de son recueil de nouvelles "Les Filles de feu" (1854).
Et l'un des plus beaux sonnets de la langue française "El Desdichado", (Le Déshérité) y figure :

El Desdichado

Je suis le Ténébreux, - le Veuf, - l'Inconsolé,
Le Prince d'Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, - et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phoebus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J'ai rêvé dans la Grotte où nage la Sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.