lundi, novembre 13, 2006

Recueil de poèmes de Rosalie Lessard

Le Père Noël fait relâche aujourd'hui pour vous faire connaître une jeune écrivaine et poétesse québécoise.
Il s'agit de ma nièce et filleule Rosalie Lessard.

Le jeudi 9 novembre, au Saint-Sulpice sur la rue Saint-Denis à Montréal, les Écrits des Forges lançaient le second recueil de Rosalie Lessard : La Chair est un refuge plus poignant que l’espace. La célèbre maison de poésie procédait à un lancement collectif ; étaient donc aussi lancés les derniers recueils de Claude Beausoleil, François Charron, Yolande Villemaire… Rosalie a eu l’occasion de lire quelques-uns de ses poèmes.

La Chair est un refuge plus poignant que l’espace scrute l’écart et l’union, décortique les liens qui unissent les êtres. À quelle distance doit-on se tenir les uns des autres ? À quelle distance de soi ? Quel espace ramène à soi ? Quel espace déroute ? Quelle relation peut nous rétablir? Comment exister dans l’amour sans se détruire?



Présentation du recueil


Dans sa langue épurée, le second recueil de Rosalie Lessard raconte l’histoire d’un exil. Un homme quitte son pays pour une femme, dont la voix porte le recueil :

tu quittes une terre pour un corps
mue des désirs
la chair est un refuge plus poignant que l’espace

Vivre avec un exilé, c’est entrer soi-même en exil, c’est accepter de devenir « corps d’attache / chair d’asile », creuset de l’identité de l’autre, c’est consentir à « remodeler le vide / ton regard sur le mien », à partager une histoire, une parole. Accepter de donner ses « souvenirs à boire / très chauds / pour rendre le nouveau monde présent ».

C’est également devenir traducteur du sensible – paysage, langage, imaginaire. C’est donc aussi déplacer ses yeux, aborder le monde depuis ses bords, ses limites, depuis la différence, dans l’éloignement et la nécessité de comprendre, d’expliquer, de donner un sens au réel qui, au premier regard, est indéchiffrable.

Le recueil dépeint donc une expérience d’expatriation culturelle qui donne lieu à une déportation intérieure, à une « migration sous terre » :

voix d’érosion
les manies et le sens transplantés
l’immigré à plat ventre
éviter le tir
d’un oubli plus total

L’œuvre de Rosalie Lessard spécule sur l’inquiétante fusion amoureuse, ce « volcan sans fenêtre », sur l’intimité, tendre et déchirante, puis sur la rupture, distance retrouvée, « la chambre où tu n’es pas / un corps à soi ».

tu m’offres des fleurs dont je ne peux prendre soin
il n’y a qu’à regarder
vivre et mourir

il n’y a toujours que soi
dans un décor qui n’en finit plus d’apparaître
soi dans les yeux et les fleurs
soi
un doigt une voix qui pointe le réel
soi derrière l’amoureux la maison le voyage
décalé décodé soi

tu m’offres des fleurs dont je ne peux prendre soin
il n’y a qu’à se regarder
vivre et mourir


Le recueil se referme sur l’esquisse et l’interrogation de quelques formes d’exil social et existentiel, notamment « la distance en soi » qu’implique tout acte terroriste :

ils ont pris une école en otage

les mains peuvent-elles tout faire
sans domicile fixe,
démolir le savant désordre du cosmos

loin des yeux
un sablier problématique avale une vaste plage

ils n’ont jamais vécu
jamais joué
ou si peu
les mains nues


Quelques liens Internet concernant Rosalie Lessard

Biographie courte
http://fr.wikipedia.org/wiki/Rosalie_Lessard

Les Écrits des Forges (Photo du recueil)
http://www.ecritsdesforges.com/2006/lachairestunrefuge.shtml

Festival international de poésie de Trois-Rivières
http://www.fiptr.com/FIPTR-fr/quoideneuf/quoideneuf_2006.html

Festival international de poésie de Manzanillo (Mexique)
http://www.oqaj.gouv.qc.ca/francais/nouvelles/n251105.html

Salon du livre de Montréal
http://www.salondulivredemontreal.com/

3 commentaires:

Anonyme a dit...

Merci Jacques pour cette pub! J'irai me procurer le second recueil de poèmes de Rosalie. C'est toi qui m'avais offert son premier recueil "À perte de monde" en 2000 avec une belle dédicace de l'auteure! Merci encore pour ce beau cadeau! Un peu de poésie dans notre vie, n'a jamais fait de tort à personne! C'est une excellente gymnatique pour la cervelle et une médecine pour l'âme! (rires)

Anonyme a dit...

Je viens de relire le long poème de Rosalie Lessard, étudiante à la maîtrise en études françaises, qui avait cet hiver remporté le prix littéraire de Radio-Canada, volet poésie. Son texte, «Petit guide des volcans d’Amérique», traite de la maternité à travers le triple portrait de femmes vivant dans trois réalités américaines aux antipodes l’une de l’autre. De toute beauté! Jacques, devrais-je le reproduire en entier sur ton blog? Est-ce que Rosalie nous en tiendrait rigueur?

Jacques Rancourt a dit...

Voici quelques autres informations concernant Rosalie Lessard :

Rosalie Lessard est née à Baie-Comeau en 1981. En 1998, 1999 et 2000, elle fait partie des lauréats du Prix International Jeunes Auteurs (Genève). À dix-huit ans, elle publie son premier recueil de poèmes, À perte de monde, puis entame une collaboration avec les auteurs-compositeurs-interprètes Mathieu Thioly et Rita Tabbakh.

En 2006, Rosalie Lessard remporte le Prix littéraire Radio-Canada, volet poésie, pour Petit guide des volcans d’Amérique. Elle complète cette année une maîtrise à l’Université de Montréal tout en enseignant la littérature au Collège Brébeuf. À titre d’assistante, elle travaille au sein de la Chaire de recherche du Canada sur la littérature québécoise et le discours culturel, ainsi qu’avec le groupe de recherche sur les archives de Gaston Miron dirigé par Pierre Nepveu et Marie-Andrée Beaudet. Son second recueil, La chair est un refuge plus poignant que l’espace, est paru à l’automne 2006 aux Écrits des Forges.

Son prix de poésie (Radio-Canada) lui a valu une invitation d’honneur au Festival de poésie de Trois-Rivières et une autre, au Festival international de poésie de Manzanillo (Mexique) auquel elle participera entre les 20 et 26 novembre.
Rosalie présentera son nouveau recueil au salon du livre de Montréal les 18-19 novembre (kiosque 339, de 12h00 à 13 h00).